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5 mars 2014 3 05 /03 /mars /2014 21:16

Luminesens - Ernst Jandl, textes choisis et transcrits de l'allemand par J. F. Mura dit K.J. Djii - Editions L'Atelier du Grand Tetras - 2013

 

Il faut oser s'aventurer dans la poésie d'Ernst Jandl ! Surtout pour la traduire, ou plus exactement la transcrire, en français, afin que la découvrent les curieux de poésie qui ne peuvent la lire dans sa langue d'origine.

Jean-François Mura dit K.J. Djii fait partie de ceux-là, très rares, qui ont osé le faire.

Ernst Jandl est né en 1925 en Autriche, à Vienne. Il restera à jamais marqué par la guerre qu'il débuta en 1943, jeune enrôlé dans la Wehrmacht et terminera, prisonnier, en Angleterre.

Après la  guerre, il entreprend des études de littérature anglaise et allemande ; sa thèse soutenue, il devient professeur, ce qui lui permet de gagner sa vie. Il fréquente des cercles littéraires, écrit, commence à publier.

"1956 sera l'année qui marquera le vrai début de la carrière littéraire de Jandl" précise Jean-François Mura. En effet, le poète publie son premier recueil Andere Augen (qui passera inaperçu) chez le même éditeur que celle qui va devenir la femme de sa vie, poète déjà reconnue, Friederike Mayröcker. "Cette année marque donc le début d'une relation autant de création que d'affection pour les deux poètes dont les destinées seront désormais inséparables." 

Dans la poésie de Jandl se trouve "une charge explosive" qui provoque dans le monde littéraire allemand, incompréhension voire rejet. Son recueil laut und luise paru en 1966, dix ans après son premier livre", est reçu comme une provocation", quoique amputé de textes que l'éditeur considère "comme trop blasphématoires et susceptibles de heurter le public."

En 1970, le troisième recueil de Jandl der künstliche baum (l'arbre artificiel) paraît en format de poche, donc à un prix accessible et c'est le succès populaire qui ne se démentira plus, y compris à l'étranger. "Ernst Jandl manque à l'appel depuis le 9 juin 2000".

"La langue de Jandl s'écoute ; son verbe s'adresse à nos oreilles avec une vitesse dénuée de toute fioriture ; il se passe quelque chose entre le monde et la voix parce que "le monde est à haute voix et que cette voix haute est belle !" explique Jean-François Mura.

Cet ouvrage bilingue permet la découverte d'une poésie concrète, vouée à l'oralité, et non dénuée d'engagement politique.

Il permet également à Jean-François Mura, lui-même poète, de s'interroger sur la problématique du passage de la poésie d'une langue à une autre :  "traduction, transcription ou interprétation ?" 

Je ne connais pas  la langue allemande, mais à la lecture de la biographie d'Ernst Jandl que propose Jean-François Mura, au vu de la modestie dont il fait preuve dans sa réflexion sur son rôle de passeur de la langue allemande vers la langue française (lui-même  maîtrise parfaitement l'une et l'autre), je suis convaincue qu'il ne trahit pas la poésie de Jandl. L'émotion que j'ai ressentie en lisant en français (à voix haute) les poèmes qui composent cet ouvrage de qualité est aussi juste que si je savais l'allemand.

 

Extraits : 

luminesens

certains croient
groite et dauche
on peut pas
condonfre.
querre elleur !

 

lichtung

manche meinen
lechts und rinks
kann man nicht
velwechsern.

werch ein illtum ! 

 

démocratie

nos prises de position
vont comme des amis
qui se séparent

 

démokratie

unsere ansichten
gehen als freunde
auseinander

 

j'sui ki j'sui
j'ai ke dal dan mon bid
si dan mon bid kek'choz y avai
kelk'un d'otr j'srai

 

i bin deri bin
in mai mogn is nix drin
waun in mai mogn wos drinwaa
wari laichd a r aundara

 

la rage
du langage
est le poème

 

die rache
der sprache
ist das gedicht 

 

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27 février 2011 7 27 /02 /février /2011 22:24
Editions Domens Pézenas, 2001 : http://www.domens.fr/

Chem Siba, jeune trentenaire d’origine marocaine berbère par sa mère et française par son père diplomate, est chercheur à la Communauté Européenne. Le travail de son équipe « consiste, en gros, à observer et analyser les quartiers en crise de certaines villes pour aider les gens de terrain à trouver des solutions. »

En route vers sa prochaine mission à Barcelone, il décide de faire un détour par la région des Corbières, en pays cathare, qu’il ne connaît pas. Par hasard, il rend service à un vieux franciscain du coin, militant dans une association mobilisée contre les arrêtés municipaux visant à interdire la mendicité à Perpignan. Touché par la volonté de ces hommes et de ces femmes aux origines diverses, il accepte de les accompagner dans leur action et de les faire bénéficier de son expérience. Dès sa première prise de parole en réunion : « A-t-on jamais vu un moineau construire un nid de cigogne ? », Chem les intrigue, les dérange et en définitive gagne leur confiance.

Avec eux, il va s’opposer aux notables conservateurs et réactionnaires, dénoncer l’incapacité des politiques, subir la violence de la mafia de la drogue protégée les puissances locales de l’argent ; il rencontre également l’amour sous les traits d’une jeune avocate issue de la bonne société qu’elle ne réussira pas à quitter. Le roman n’échappe pas à tous les poncifs !

 

Mais le propos mérite que le lecteur dépasse le premier degré, car, en réalité, l’intérêt de cet ouvrage ne réside pas dans l’histoire de Chem à Perpignan. Celle-ci est un prétexte permettant à l’auteur une réflexion sur les moyens de lutte à opposer à l’immobilisme social, à la corruption, à la violence.

 

La nuit, dans les marigots, les lions boivent à côté des antilopes. Et, dans nos villes, on voit des voisins, qui s’ignorent dans le quotidien, changer leurs premiers mots quand ils se rencontrent dans un endroit inhabituel. Je pense qu’il y a toujours un temps, un lieu où la relation, même la plus figée, est susceptible de se modifier naturellement. Alors, c’est l’ouverture. Le dialogue peut s’instaurer et tout est modifié. C’est pourquoi il est des luttes dont le seul objectif est d’amener l’adversaire à la table des négociations. La non-violence, ce n’est ni la fuite, ni la soumission, ni de l’angélisme, c’est une lutte pour la justice, pour la paix, pour l’accord. […] (Le non-violent) voit qu’en tout homme, même le pire, il y a du bon et il croit que cette bonté peut prendre le dessus.

 

—–—–

 

La seule biographie d’Yves Chevallier que j’ai pu trouver figure en quatrième de couverture de son roman : il fut juge au tribunal de Béziers puis conseiller à la cour d’appel de Basse-Terre à la Guadeloupe, où il est décédé en 2000. Il avait fondé à Béziers l’Association Biterroise de Prévention. Il était également chrétien convaincu, imprégné de saint François d’assise et Lanza del Vasto.

 

J’ai lu ce livre par hasard, prêté par une amie et je ne le regrette pas. Prenant une image « musicale », je dirai que, comme dans une chanson engagée, ce que je garde en mémoire de ce roman, ce sont les paroles bien plus que la mélodie.

Et si je prends une image cinématographique, j’ajouterais que l’on peut être touché par le message porté par ce roman quelles que soient ses convictions religieuses ou politiques, de la même manière qu’on peut l’être par le film « Des Hommes et des Dieux » de Xavier Beauvois.

 

Le grand NON, il faut bien le poser, au bon endroit ! Si on le met devant la violence, il n’y a plus de débat sur la violence légitime ni sur la violence nécessaire. La non-violence, c’est le renoncement à toute violence. Point final.

 

 

Annie Raynal-Andrieu

 
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7 décembre 2010 2 07 /12 /décembre /2010 17:28

Joëlle Brière écrit, dessine et offre ses histoires dans des livres si beaux qu'ils méritent le qualificatif de livres d'art.

 

Désireuse de ne plus dépendre des autres et de donner à ses oeuvres une présentation qui correspond à sa personnalité : "des textes courts, forts, de tous genres littéraires et pour tous. La Renarde aime les beaux livres illustrés de préférence...", elle décide de créer sa propre maison d'édition.

Les Editions de la Renarde Rouge naissent en 1994.

 

Cette mystérieuse renarde douce se décrit ainsi sur son site :

"C'est une petite Renarde qui va...
élégante, drôle, déterminée, secrète, souple comme les mots.
Rouge comme la passion et l'exigence.
Rouge comme le cri : l'écrit !"

 

Pourquoi une renarde ? Pourquoi rouge ? Pourquoi les livres et l'écriture ? Le sait la petite fille qui, interloquée par la joie du premier livre lu, raconte :

"Je referme mon livre. Je dégringole la pente herbue. Notre mère tricote une pelote inépuisable.

- Maman, maman, il faut que l'on rentre, j'ai des choses importantes à écrire, une terre nouvelle à conquérir et ça ne peut pas attendre !" (Joëlle Brière, Le premier livre, éd. La Renarde Rouge, 2010)

 

Editions de La Renarde Rouge - 89510 Véron

Site Internet

 

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